A priori, le choix de ce comédien discret avait pourtant étonné. Mais à l’issue de la cérémonie plus un seul critique n’aurait osé rappeler qu’il avait été vaguement sceptique. C’est donc en toute logique que les organisateurs ont à nouveau fait appel au comédien bruxellois, irrémédiablement lié comme de nombreux autres acteurs belges brillants à l’univers des frères Dardenne.
Jean-Pierre et Luc ont bien sûr révélé Olivier Gourmet, Déborah François, Jérémie Rénier, Thomas Doret. Mais aussi Emilie Dequenne qui sera cette année, la présidente d’Honneur de la cérémonie et cet Italo-Belge ténébreux qui partagea avec elle une première Palme d’or à 26 ans : c’est lui qui interprétait Riquet dans
Rosetta.
À l’époque, Fabrizio est encore au Conservatoire et ce démarrage tonitruant est une première consécration qui le conforte dans ses choix de carrière. Très attaché au duo sérésien (qui le lui rend bien), il reviendra dans quatre autres de leurs œuvres:
L’Enfant (deuxième Palme),
Le Silence de Lorna, Le Gamin au Vélo et
Deux Jours, une Nuit, le nouveau long métrage du duo qui est presque terminé (mais non encore mixé). Fabrizio y incarne le mari de Marion Cotillard, soit le premier rôle masculin d’un film dont on attend monts et merveilles, il faut l’avouer.
Quand il n’est pas sur le plateau des frères, Fabrizio Rongione alterne le cinéma, le théâtre et la télévision. On l’a vu sur grand écran dans
Le dernier gang d’Ariel Zeitoun,
Ça rend heureux signé par Joachim Lafosse ou
Le Parole di mio de Padre qu’il a tourné en Italie comme
La Prima Linea (une coproduction des Films du Fleuve). Cette année, il était présent dans
La Religieuse de Guillaume Nicloux aux côtés de Pauline Étienne ou Pierre Nisse et dans le drôle et tendre
Une Chanson pour ma mère de Joel Franka, nommé pour le Magritte du meilleur premier film.
Sur les planches, il a brillé dans
C’était Bonaparte, un spectacle de Robert Hossein où il se retrouve carrément à la tête de plus de 80 acteurs. À la télévision, c’est dans des séries comme
Mafiosa ou
Un village français qu’il a tracé son sillon.
Dans les années 2000, on l’a également croisé deux fois seul en scène, une activité qui lui va comme un gant et qui lui a évidemment conféré la confiance et l’audace nécessaires pour aborder l’exercice périlleux de la présentation des Magritte devant toute la profession.
L’an dernier, comme il l’avait promis, Fabrizio avait joué sur le registre de la connivence avec un public rapidement tombé sous le charme. Ce plaisir de la complicité avec les spectateurs, cet amour des mots, il l’a découvert avec son premier spectacle,
A Genoux, coécrit avec
Samuel Tilman, Magritte 2011 du meilleur court métrage pour
Nuit Blanche et coauteur des textes pour les Magritte. Pour cette nouvelle expérience, il s’est aussi adjoint les services de Thomas Gunzig, plume des deux premières éditions et coscénariste du prochain long métrage de Jaco van Dormael. Dream team.
Il faut dire que Fabrizio aime le collectif : il adore confronter ses idées à celles de ses amis. Dès 2002, il crée
Eklektik Productions avec Samuel, mais également Nicolas de Borman et Stéphane Heymans. C’est dans ce cadre qu’il va par exemple rencontrer Joachim Lafosse avec qui il écrira
Ça rend heureux.
Mais la scène le tenaille et il revient se frotter au public avec
On vit peu mais on meurt longtemps un deuxième spectacle très drôle qui fera (notamment) les beaux jours du TTO.
Sur les planches et sur les écrans,
Fabrizio Rongione mène une carrière sans faute, où, échelon après échelon, il ne cesse de nous épater. Autant dire qu’on attend déjà avec impatience les grands moments et les petites plaisanteries qu’il nous réserve pour cette 4e cérémonie où il retrouvera avec un plaisir non dissimulé sa copine Emilie Dequenne. Complicité assurée.