Le film dépeint la cavalcade haletante de Mady, un jeune serrurier piégé au mauvais endroit, au mauvais moment. Le temps d’une nuit de fièvre au coeur d’une Bruxelles qui gronde au rythme d’une manifestation Black Lives Matter, Mady repousse toutes ses limites pour sauver sa peau, sans trahir ses idéaux. En cours de route, le thriller social vire au film d’action, porté par la jubilation contagieuse de son réalisateur quand il s’agit de s’emparer des codes du genre pour les appliquer à sa ville, Bruxelles, le temps d’une nuit qui ne finit pas.
Michiel Blanchart s’impose avec ce premier long comme un jeune cinéaste belge prometteur sur lequel Hollywood a déjà parié. Son dernier court métrage, T’es morte Hélène, développé à la résidence So Film de genre, Prix du Meilleur court à Gérardmer, shortlisté aux Oscars et nominé aux Magritte du Cinéma 2022, a tapé dans l’oeil de Sam Raimi qui en a acquis les droits pour une adaptation américaine en long métrage, actuellement en cours. Paré d’une belle ambition cinématographique, La Nuit se traîne fait résonner Bruxelles de nouvelles vibrations, en faisant le terrain idéal d’un cinéma d’action profondément ancré dans le monde d’aujourd’hui. Il a su rencontrer les faveurs de la critique comme du public, puisque près de 45.000 spectateurs se sont déplacés pour aller voir le film en Belgique l’année dernière.
Le film est en lice pour le Magritte du Meilleur film ainsi que pour celui du Meilleur premier film. Sa mise-en-scène nerveuse, qui réconcilie les goûts hétéroclites de cinéphile de Michiel Blanchart, des films d’aventures américains des années 80 aux thrillers sociaux européens, lui vaut une nomination pour le Magritte de la Meilleure réalisation. La mécanique de précision qui orchestre la fuite de Mady et la chasse à l’homme qui s’en suit est par ailleurs saluée par une nomination pour le Magritte du Meilleur scénario.
Côté interprétation, si le rôle principal échoit à l’excellent jeune comédien français Jonathan Feltre, et que Romain Duris joue les méchants avec le talent qu’on lui connaît (tous deux non éligibles), les membres de l’Académie André Delvaux ont retenu la prestation de deux « anciens » espoirs belges qui ont depuis fait leurs preuves: Jonas Bloquet, sacré espoir lors de la 1ère édition de la Cérémonie pour son rôle dans Elève Libre de Joachim Lafosse est donc nominé pour le Magritte du Meilleur second rôle masculin, de même que Thomas Mustin, auréolé du titre de Meilleur espoir en 2019 pour L’Echange des Princesses.
La direction artistique est entièrement saluée par les membres de l’Académie, qui ont apprécié l’excellence des différentes équipes à l’œuvre sur le film. On retiendra d’ailleurs que nombre des chef·fes de poste sont nominé·es pour la première fois, mettant en lumière la vitalité et le renouvellement des talents dans le paysage cinématographique belge. Sylvestre Vannoorenberghe sera donc en lice pour le Magritte de la Meilleure image. Fidèle compagnon de route du cinéaste (il a notamment oeuvré sur ses courts métrages Cul et T’es morte Hélène), il est par ailleurs familier de l’univers des frères Guit, pour lequel il avait signé l’image de Fils de Plouc. Egalement nominé, Matthieu Jamet-Louis, jeune monteur qui avait jusqu’ici fait ses armes en court métrage, notamment sur Les Huîtres, nominé l’année dernière. L’équipe son (David Gillain, Joey Van Impe, Thibaud Rie, Fabrice Grizard, Antoine Wattier et le « vétéran » David Vrancken, primé en 2022 pour Un monde et en 2023 pour Animals) se voit également attribuer une nomination, de même qu’Isabel Van Renterghem pour les costumes, qui a travaillé sur des séries flamandes comme Roomies ou Beau Séjour, et était également éligible cette année pour Un silence de Joachim Lafosse. Last but not least, le film vaut également une 4e nomination dans la catégorie Meilleurs décors à la talentueuse Catherine Cosme - qui a également signé cette année les décors du film de Michèle Jacob, Les Enfants Perdus.
La Nuit se traîne est produit par Michaël Goldberg et Boris Van Gils pour Boucan Brussels, duo qui accompagne Michiel Blanchart depuis ses deux derniers courts métrages, déjà nominé à trois reprises dans la catégorie Meilleur Film pour Le Monde nous appartient de Stephan Streker en 2014, Les Rayures du Zèbre de Benoît Mariage en 2015, et Noces de Stephan Streker encore, en 2018.