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Les Magritte du Cinéma
14e édition - 22 février 2025

27 janvier 2025 - 08:10:09

Focus sur… « Quitter la nuit »

Avec son premier long métrage, Quitter la nuit, Delphine Girard totalise 9 nominations, saluant la belle complémentarité de tous les talents qui ont concouru au succès du film
Dans ce film délicat mais qui pourtant n’hésite pas à aborder frontalement des questions brûlantes, la cinéaste s’interroge sur l’après. Que se passe-t-il après un viol? Comment accompagne-t-on la victime? Quel chemin suit l’agresseur? Quel peut être le rôle des témoins, et quelle place la justice fait-elle à chacun·e? Et surtout, comment sortir de l’ombre pour retrouver la lumière, que ce soit celle de la vie ou de la vérité?

Quitter la nuit est inspiré du court de la réalisatrice, Une soeur, en lice pour le Magritte du Meilleur court métrage de fiction en 2019, et nominé aux Oscars, rien que ça, en février 2020. On y retrouve les trois protagonistes et interprètes principaux du premier film: Selma Alaoui incarne Aly, jeune femme libre et enthousiaste, qui tente vaille que vaille de surmonter un statut de victime qu’elle se refuse d’endosser. Veerle Baetens est Anna, l’opératrice qui voit sa vie bousculée par un coup de fil nocturne, obsédée par le devenir de cette femme. Guillaume Duhesme enfin est Dary, celui qui a violé, et dont l’image de bon fils et de bon voisin ne peut coïncider avec l’agresseur. La situation de départ - l’agression, une nuit, dans une voiture qui roule, et l’appel aux services de secours -, est revisitée, puis Delphine Girard suit ses personnages, les accompagne dans leur retour chaotique au quotidien après le drame.

Le film est en lice pour le Magritte du Meilleur film et du Meilleur premier film, mais aussi pour ceux du Meilleur scénario, soulignant l’habileté avec laquelle sont tissées ces trois trajectoires, et de la Meilleure réalisation, saluant la force d’un film qui tout en subtilité, parvient notamment à faire comprendre la façon dont un évènement traumatique comme une agression sexuelle se répercute sur un temps long dans la vie des victimes, toujours remises en question, et dans celle des violeurs, entre déni et prise de conscience.

Pour incarner ces questionnements âpres, il fallait un casting à la hauteur, que les membres de l’Académie André Delvaux ont choisi de distinguer, en nommant dans la catégorie Meilleure actrice l’excellente et bouleversante Selma Alaoui, dont c’est la première nomination aux Magritte du Cinéma, et qui a également été retenue pour ce rôle parmi les Révélations des César 2025, ainsi que Veerle Baetens, une habituée de la Cérémonie, puisqu’elle a déjà été couronnée deux fois pour Un début prometteur en 2016 et Duelles en 2020.

La direction artistique du film a également été particulièrement appréciée. La Directrice de la photographie Juliette Van Dormael obtient ainsi sa deuxième nomination dans la catégorie Meilleure image (après celle obtenue pour Mon ange en 2018), pour sa capacité à injecter de la lumière dans cette histoire tout en clairs-obscurs. Du côté des décors, c’est la décidément incontournable Eve Martin qui démontre une fois de plus tout son savoir-faire, après avoir déjà gagné les deux derniers trophées pour Close de Lukas Dhont et Augure de Baloji. Enfin, la subtile alchimie trouvée au montage par Damien Keyeux lui vaut lui aussi une nouvelle nomination dans la catégorie, après les prix obtenus en 2015 pour La Marche et 2020 pour Duelles.

Quitter la nuit a fait sa première internationale au prestigieux Festival de Venise, dans la section Giornate degli Autori où il a remporté le Prix du Public. Le film est produit par Jacques-Henri Bronckart pour Versus Production, un habitué de la course au Meilleur film, puisque c’est sa 13e nomination dans cette catégorie (en comptanr son autre nomination de l’année pour Une part manquante de Guillaume Senez!), catégorie remportée à 5 reprises pour Les Géants, A perdre la raison, Les Premiers les derniers, Duelles et Nobody Has to Know.