Avec Une part manquante, Guillaume Senez explore à nouveau la complexité de la figure paternelle, à travers l’histoire d’un homme éloigné de sa fille, Lily. Jay est français, mais il habite au Japon depuis de nombreuses années. Séparé de la mère – japonaise – de Lily, son statut de père lui a été confisqué, on ne l’autorise plus à l’élever. Au moment où débute le film, Jay semble avoir atteint son point de rupture. Il est prêt à abandonner, à quitter ce pays où malgré ses tentatives de s’intégrer, il est toujours resté un étranger, un Gaijin. Mais au hasard d’une course en taxi, il va retrouver sa fille. Une part manquante explore tout autant l’obsession d’un père que le statut irréductible de l’étranger. Eternel exilé, Jay s’est oublié à trop vouloir d’adapter, comme il a été effacé de la mémoire de sa fille. Il est tout autant rejeté par son ex-femme et donc sa famille que par le corps social qu’il a voulu intégrer. Pourtant, cet échec est traversé par une lumière que l’on voit poindre, de plus en plus brillante au fil du film, alors que la nuit fait place au jour, et que Lily, l’enfant confisquée, prend sa place dans le récit.
Une part manquante offre à Guillaume Senez une troisième nomination dans la catégorie Meilleur film, qu’il a déjà remportée en 2019 (avec sa productrice, Isabelle Truc) pour Nos batailles, qui lui avait également valu le Magritte de la Meilleure réalisation.
En outre, la direction artistique du film est saluée à travers trois autres belles nominations. Déjà primée en 2017 et en 2019 pour les deux premiers films de Guillaume Senez, Keeper et Nos batailles, Julie Brenta est à nouveau nominée dans la catégorie Meilleur montage. L’équipe son est elle aussi mise en lumière: Nicolas Paturle, Olivier Thys (primé en 2019 pour Laissez bronzer les cadavres et en 2024 pour Dalva), Franco Piscopo (primé en 2014 pour Ernest et Célestine, nominé en 2017 notamment pour Keeper) et Virginie Messiaen (elle aussi nominée en 2017 pour Keeper) sont donc en lice pour le Magritte du Meilleur son. Enfin, Julie Lebrun, qui a déjà travaillé avec le réalisateur sur Nos batailles ainsi que sur son court métrage Mieux que les rois et la gloire se voit nominée pour le Magritte des Meilleurs costumes.
Une part manquante est produit par Jacques-Henri Bronckart pour Versus Production, grand habitué de cette catégorie, puisque c’est sa 13e nomination dans cette catégorie (si l’on compte son autre nomination de l’année pour Quitter la nuit de Delphine Girard), catégorie remportée à 5 reprises pour Les Géants, A perdre la raison, Les Premiers les derniers, Duelles et Nobody Has to Know.