Découverte à 15 ans dans A nos amours de Maurice Pialat, pour lequel elle reçut un César du Meilleur espoir, Sandrine Bonnaire habite le cinéma d'auteur français depuis plus de trois décennies de son sourire solaire et sa silhouette gracile. Sa carrière est une vraie déclaration d'amour à ces cinémas denses et intenses, comme si son physique si naturel était le messager idéal d'un art cinématographique souvent naturaliste, un cinéma ancré dans le réel.
Sa filmographie égrène les grands noms du cinéma français de ces trente dernières années: Pialat bien sûr, mais aussi Patrice Leconte, Jacques Doillon, André Téchiné, Jacques Rivette, Claude Chabrol, Régis Wargnier, Raymond Depardon, ou encore Agnès Varda, qui avec Sans toit ni loi lui offrit le rôle de Mona, qui lui valut un César de la Meilleure actrice deux ans à peine après son espoir. Comédienne respectée et consacrée, elle a notamment reçu en plus de ces deux prix pas moins de 5 nominations pour le César de la Meilleur actrice, et un Prix d'interprétation à la prestigieuse Mostra de Venise pour La Cérémonie de Claude Chabrol en 1995.
Mais derrière cette apparente gravité apparaissent parfois des rayons de légèreté, si bien captés par Philippe Lioret par exemple dans Mademoiselle, ou Pierre Jolivet dans Je crois que je l?aime. Car sa vocation, avant Pialat, c'est comme figurante sur les plateaux de deux films populaires des années 80 qu'elle l'a trouvée, La Boum, et Les Sous-Doués. Sandrine Bonnaire rayonne d'une popularité douce, une de ces popularités presque évidente, nourrie tout à la fois de discrétion et de charisme, de proximité et de ressemblance. Une comédienne qui ressemble aux personnages qu'elle interprète, des « petites femmes fortes » comme elle aime à les définir.
Sa carrière, si régulière, s'est aussi déployée sur le petit écran. Dès la fin des années 90, alors que ce n'est pas encore à la mode, elle n'hésite pas à se tourner vers la télévision, où elle trouve des rôles d'héroïnes fortes et populaires. Elle y croise d'ailleurs en 2016 la route du réalisateur belge Alain Berliner, pour le film Bébés Volés.
Dans le courant des années 2000, elle se lance vers la réalisation, d'abord avec un documentaire, Elle s'appelle Sabine, consacré à sa jeune soeur autiste, un portrait fort et pudique sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs, où il a d'ailleurs reçu le Prix Fipresci. En 2012, elle réalise son premier long métrage de fiction, J'enrage de son absence, un drame familial qui met en scène William Hurt et Alexandra Lamy, sélectionné à la Semaine Internationale de la Critique de Cannes. Elle vient de réaliser deux portraits de musiciens, l'un consacré à Jacques Higelin, l'autre à la chanteuse anglaise Marianne Faithfull. Alors qu'on l'a vue à l'automne dans le bouleversant film de Gaël Morel, Prendre le large, on la verra fin janvier dans le nouveau film de Mahamat Saleh Haroun, Une saison en France.
Le 3 février prochain, l'Académie André Delvaux et la RTBF se réjouissent de consacrer cette personnalité exceptionnelle, qui succèdera en tant que Magritte d'Honneur à André Dussolier, Vincent Lindon, Pierre Richard, Emir Kusturica, Costa-Gavras, Nathalie Baye et André Delvaux.